Les suicides d’adolescents pour harcèlement font de plus en plus la Une des journaux. Et pourtant ce harcèlement entre ados a toujours existé dans les écoles. Des têtes de turcs, il y en a toujours eu, chez les filles surtout, mais aussi chez les garçons.
Dieu sait si je me rappelle du harcèlement à l’école primaire. A cette époque on appelait ça de la moquerie, mais les effets étaient les mêmes, et si Facebook n’existait pas encore, c’était la cour de récréation qui était le théâtre de la traque aux différences.
Car c’est toujours en fonction des différences que s’insinuent harcèlement ou moquerie, et que cela soit pour des différences en bien ou en mal, peu importe, la différence à cet âge incite toujours au persiflage, à la raillerie et aux quolibets. Exemples :
- Le bon élève était traité de chouchou du prof, ou même de lèche-cul.
- Le mauvais, « d’ennocint catwace » (wallon liégeois)
- L’obese, de gros-plein-de-soupe
- Le grand, de grand-dadais ou grand bènet, (wallon liégeois).
- Le roux, de laid rossaîs.
- Celui qui louchait, de vî lusquet etc. etc. etc.
Les réactions à ces moqueries étaient bien sûr différentes en fonction des caractères : certains pleuraient ou essayaient de se cacher, d’autres réglaient ça aux poings.
Je me rappelle que les profs (les chers frères dans mon cas), nous sermonnaient quand ils nous attrapaient à nous moquer des autres, mais bien sûr, rien n’y faisait. A la récré suivante ça recommençait.
Je sais que certaines de ces têtes de turcs en souffraient réellement, je me rappelle notamment des cas d’un « enoçint catwace » et d’un « gros plein de soupe » qui étaient les cibles préférées de ma classe.
Personnellement, à cette époque, je n’ai pourtant jamais entendu parler de suicide, mais bien sûr, comme en tout, en 70 ans, les choses ont bien changé, notamment le retentissement énorme des harcèlements dans les réseaux sociaux. Mais malgré cela, ou surtout pour cela, on ne peut rester muet devant ces suicides en série de nos ados. Ça doit changer à tout prix.
Je sais qu’il est quasi impossible de demander aux élèves d’une classe d’ados de dénoncer ceux qui harcellent, qui sont aussi leurs compagnons. Il a toujours régné dans cette catégorie d’âge une sorte de code de l’honneur qui les empêche de « donner » un ou des condisciples.
Mais n’y aurait-il pas un autre moyen ?
On nous dit que suite à ces nombreux suicides, les profs tentent de mentaliser leurs élèves à ce sujet, mais il n’y a pas l’air que cela serve à grand-chose !
Alors, une idée me passe par la tête !
Si l’on proposait aux élèves, non de dénoncer les harceleurs mais de signaler les harcelés, je crois que cela ne leur poserait pas de cas de conscience car il ne s’agirait pas là d’une dénonciation, mais d’un acte citoyen.
Cette « signalisation » pourrait même être faite de façon anonyme et permettrait aux parents et éducateurs de se rendre compte, à temps, du problème afin de pouvoir prendre les mesures nécessaires avant d’en arriver au drame. Ceci sans avoir à dénoncer qui que ce soit !
Je crois d’ailleurs que les élèves seraient aptes à comprendre que ne pas le faire serait finalement de la « non-assistance à personne en danger ».
Si cette idée pouvait tomber sous l’œil d’un enseignant qui l’appliquant pouvait sauver la vie d’un de nos ados, cette brève serait pour moi la chose dont je serais le plus fier.
Jo